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Surdité, des questions et des constats

Les personnes sourdes et malentendantes rencontrent, on le sait, de nombreuses difficultés tant dans leur vie quotidienne, que professionnelle. Je suis allée à leur rencontre pour ensuite interroger les Ministres concernés, tant au parlement wallon qu’au parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles et y relayer leurs questions et attentes.

J’ai donc récemment sollicité le ministre Prévot en commission de la santé pour obtenir IMG_4062un état  des lieux statistique de la population wallonne sourde et malentendante. Il est important d’évaluer l’ampleur de ce handicape. En Belgique, 10% de la population est concernée par un problème d’audition, ce qui représente plus ou moins 45.000 sourds de naissance et 930.000 personnes devenues sourdes et malentendantes appareillées.

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Pour la Wallonie par contre, cela représente environ 25.000 sourds et 450.000 malentendants, mais ces données ne sont que des approximations parce que notre Région ne  dispose pas de statistiques ciblées, réalisées par des organismes tels que l’IWEPS.

 

Je l’ai également interrogé sur la sensibilisation des jeunes aux risques de surdité notamment lors de l’écoute intensive de musique avec des casques audio. Est-ce que des campagnes de prévention sont menées, est-ce qu’un budget spécifique est dégagé pour cette prévention?

Dans sa réponse, le ministre a mentionné le projet « Quality Nigths » de l’ASBL Modus Vivendi. Il s’agit non pas d’une approche de sensibilisation, mais plutôt d’une mission à cheval entre la prévention et les soins : l’approche spécifique de la Réduction des Risques (RdR) soutenue par la Wallonie. Ce projet vise à améliorer le bien-être des personnes qui se rendent dans les lieux festifs en Wallonie, notamment via la distribution de bouchons d’oreille, pour les sensibiliser aux effets du son. En 2015, Modus Vivendi renseigne que 11.000 bouchons d’oreille ont, par exemple, été distribués lors du Festival de Dour. Cette asbl indique que « les pertes d’audition et autres troubles auditifs sont en très nette augmentation ».

Une étude réalisée en France auprès de 6.000 élèves de 17 ans, révèle que plus de 25% d’entre eux présentaient un déficit reconnu comme grave, soit une perte auditive égale ou supérieure à 20 décibels. Selon le Ministre, la réduction des nuisances sonores relève, en partie, de la précaution. D’une part, parce que la gêne subie et les risques auditifs sont avérés et, d’autre part, parce que les autres effets sanitaires du bruit sont encore mal appréciés.

Les pratiques et comportements sont déterminants : les jeunes sont ainsi particulièrement exposés en raison d’habitudes d’écoute de musique amplifiée à des niveaux sonores élevés. Les expositions auxquelles sont soumis les enfants à l’intérieur des locaux scolaires, notamment dans les cantines et salles de sport, sont également problématiques.

 

Au sujet du soutien matériel et financier de la Wallonie pour les enfants sourds et malentendants, j’ai demandé au ministre Prévôt si la Région intervenait dans l’achat et l’entretien de l’appareillage des enfants sourds et malentendants et, le cas échéant, jusqu’à quel âge.

C’est en fait l’Institut National d’Assurance Maladie-Invalidité (INAMI), qui en assure la prise en charge financière. Par contre, au niveau wallon, l’AViQ (l’Agence pour une Vie de Qualité) peut apporter un soutien quant à l’aide matérielle individuelle pour divers produits d’assistance à la communication et à l’information permettant de pallier les difficultés graves pour écouter (par exemples : systèmes de transmission FM ou Bluetooth, casques infrarouges, ordinateurs portables, réveils vibrants, etc.). Il est également important de souligner que l’AViQ peut aussi intervenir financièrement dans l’accompagnement pédagogique d’étudiants en situation de handicap qui suivent des études supérieures, universitaires ou non, reconnues par la Fédération Wallonie-Bruxelles ou qui suivent une formation pour adultes. La formation subventionnée peut aussi être une formation en langue des signes.

 

Je l’ai enfin interrogé sur la présence d’un référent en langue des signes, tant  dans les hôpitaux que dans les administrations communales wallonnes.

En ce qui concerne les hôpitaux, j’ai malheureusement dû constater que l’accès aux soins de santé n’est pas encore garanti pour les personnes qui ont des déficiences auditives.

Le Ministre semble conscient de ce problème et préconise de suivre deux pistes :

1)           le développement des technologies de l’information et de la communication afin d’étendre la médiation entre le personnel médical et les personnes sourdes ;

2)           l’apprentissage de la langue des signes par une partie du personnel soignant.

Au niveau des administrations communales, le Ministre m’a indiqué que 63 communes (sur 253 communes francophones) ont répondu à une enquête de 2012. Il ressort des résultats que seulement 8 communes font appel à Sourdimension ; que, dans 4 communes, le Handicontact maîtrise la langue des signes ; que, dans 7 communes, un agent communal maîtrise la langue des signes ; que, dans 2 communes, il existe un Handicontact  et qu’un agent communal maîtrise la langue des signes ; et qu’une commune organise tous les 15 jours une aide à la communication.

Ce n’est vraiment pas fameux et le Ministre s’est engagé à étudier l’opportunité d’adresser une lettre circulaire aux communes et aux pouvoirs locaux.
Je l’interrogerai prochainement pour vérifier le suivi de cet engagement.

 

En parallèle, la formation des interprètes en langue des signes est une autre piste à exploiter.

À cet effet, j’ai interrogé le Ministre Marcourt, en charge de la formation au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Actuellement, la demande d’interprètes en langue des signes est importante sur le marché du travail. Nous assistons d’ ailleurs à une forte pénurie. Il existe pourtant bien des formations universitaires d’interprètes en langue des signes, mais ces formations sont longues (5 ans), se donnent en journée et peu d’étudiants les suivent (seulement une vingtaine actuellement). Par ailleurs, les personnes qui ont suivi des formations plus courtes, en promotion sociale, ont l’impression que leur diplôme est dévalorisé et qu’il ne servira plus à rien.

Pourtant, complémentairement à ces formations universitaires d’interprètes, d’autres débouchés sont possibles. Comme le secteur me le rappelait récemment, les centres, services et associations de sourds ont besoin d’interprètes professionnels qualifiés, mais également, d’agents administratifs, de comptables, de juristes, de paramédicaux, etc., capables  de communiquer en langue des signes, sans nécessairement suivre une formation lourde de 5 ans en journée.

Il est donc primordial que l’offre et la demande correspondent. Le Ministre Marcourt semblait conscient de la situation et m’a assurée du suivi du dossier. Des contacts seront pris avec son homologue en charge de l’enseignement de promotion sociale.

 

Enfin, j’ai également interrogé le Ministre Marcourt, mais avec sa casquette de Ministre des Médias cette fois, pour faire le point, avec lui, sur la politique de doublage et de sous-titrage de la RTBF et des chaines de télévision locales.

Le Ministre m’a rappelé les obligations auxquelles sont soumis les éditeurs.

Il m’a confirmé le développement de la cellule ACCESS de la RTBF qui se charge du sous-titrage de certains programmes de la RTBF pour les personnes sourdes et malentendantes.  Elle travaille aussi au niveau de l’interprétation en langue des signes des « Niouzz » et du Journal de 19h30. Par ailleurs, toutes les émissions en prime time de La Une sont désormais sous-titrées du lundi au vendredi de 18h30 à 21h ou 22h, selon les jours. Enfin, la RTBF a l’ambition d’élargir l’accessibilité au prime time le week-end, en sous-titrant des émissions telles que « 7 à la Une » et « le Week-end sportif ».

Par contre, le Ministre me confirmait que seules 3 télévisions locales sur 11 proposent quelques programmes traduits en langue des signes. Ce n’est vraiment pas assez !

 

Bref, il y encore beaucoup à faire en faveur de ces personnes qui souhaitent vivre normalement malgré leur handicape et être autonomes ! Vu le vieillissement de la population et l’utilisation abusive des casques audio avec un volume excessif, les personnes en déficience auditive seront de plus en plus nombreuses. Il est urgent de trouver des solutions pour leur garantir une qualité de vie qu’elles sont, comme tout autre citoyen, en droit de prétendre.

Sur base de ces constats, je suis ravie d’avoir consigné la proposition de résolution de ma collègue, Carine Leconte, à l’attention du gouvernement en vue de soutenir les personnes sourdes.